Le magazine « Global » (« Alliance Sud ») a fait une interview avec Achim Steiner, le chef du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) Il s’inquiète du recul du soutien financier de pays comme la Suisse. Entretien mené par Laura Ebneter, Marco Fähndrich et Andreas Missbach.
Monsieur Steiner, dans son Rapport sur le développement humain 2024, le PNUD constate que les progrès inégaux en matière de développement laissent les plus pauvres de ce monde pour compte — l’inverse de l’objectif de l’Agenda 2030, « ne laisser personne de côté ». Où voyez-vous les plus grands leviers pour éviter que le fossé ne se creuse davantage ?
Sur la toile de fond de la pandémie et des nombreux conflits et crises, le bilan est à première vue décevant. Nous nous étions fixés de grands objectifs avec l’Agenda 2030. Mais comme souvent, on fait des projets et on essuie des revers. Nous ne devons toutefois pas oublier les énormes avancées réalisées au cours des dernières décennies, qui ne sont malheureusement pas perçues de la même manière par le public. En 1995, 16 millions de personnes dans le monde étaient connectées à l’internet. En 2025, plus de 6 milliards de personnes seront connectées, soit plus que l’ensemble de la population mondiale en 1995. L’accès à l’électricité s’est lui aussi massivement amélioré. La coopération internationale y a largement contribué…
… et pourtant, c’est une maigre consolation face aux multiples crises dans le monde.
C’est également vrai. Nous sommes confrontés à une situation où les pays les plus pauvres ont de la peine à rembourser leurs dettes. Le Sri Lanka en est un exemple. Il y a près de 50 Etats qui consacrent plus de 10 % de leur budget national au seul service de la dette. C’est pourquoi nous assistons à des coupes dans l’éducation et la santé pour payer les intérêts ; cela ne peut pas être propice au développement. Et lorsqu’un pays ne peut plus approvisionner sa population en nourriture et en carburant, les gens descendent dans la rue. C’est justement maintenant qu’il faudrait plus d’investissements. Et pourtant, les pays donateurs réduisent leurs moyens… Les pays riches de l’OCDE ne consacrent que 0,37 % de leur revenu national brut à la coopération internationale. Au vu des énormes tâches et possibilités de notre époque, je suis très inquiet de constater que nous ne trouvons pas les moyens nécessaires pour travailler, surtout dans les pays donateurs traditionnels. Et ce, bien que nous ayons montré combien nous pouvions accomplir ensemble.
Que demandez-vous au monde politique ?
Les parlementaires doivent mener une discussion honnête sur la coopération internationale et reconnaître que les intérêts nationaux sont de plus en plus protégés dans le contexte mondial. Les gouvernements agissent par opportunisme politique et se détourner des solutions communes est une attitude irréfléchie et, en fin de compte, irresponsable. Prenons le changement climatique : la question n’est plus de savoir s’il existe, mais comment nous pouvons y remédier dans tous les pays. Le fait que nous ne puissions pas présenter ces liens de manière plus claire, que nous continuions à miser sur les énergies fossiles dans de nombreux pays au lieu de promouvoir les énergies renouvelables, est un échec. Tout en sachant qu’entre-temps, des milliers de personnes meurent prématurément chaque année en Suisse, en Allemagne et dans d’autres pays européens à cause de la chaleur.
Le fait que la Suisse réduise elle aussi son engagement est-il perçu au niveau international ?
Il y a encore cinq ans, la Suisse était un modèle en matière de coopération internationale : elle reconnaissait l’importance du multilatéralisme, surtout pour un petit pays. Malheureusement, elle a peu à peu réduit ses contributions au PNUD, même si elle reste un pays donateur de poids. Sans les Nations Unies, la marge de manœuvre des petits pays dans les régions en crise tend vers zéro. Depuis son adhésion à l’ONU, la Suisse a joué un rôle stratégique. Si elle recule, sa réputation et son influence vont également diminuer.
Quel rôle joue la polarisation croissante dans le monde ?
La polarisation empêche la coopération internationale et mène à une impasse. Ma plus grande inquiétude est que le monde se désunisse de plus en plus au lieu de coopérer. L’année dernière, 2 443 milliards de dollars ont été dépensés pour la défense et l’armée. Ce n’est pas seulement un record historique, c’est aussi le signe que la confrontation s’intensifie. Il y a des raisons concrètes à cela, comme la guerre en Ukraine et les conflits au Myanmar ou au Soudan. Mais les problèmes du monde ne peuvent être résolus que si les différents pays trouvent le moyen d’agir ensemble malgré leurs intérêts divergents, que ce soit pour la prévention de la prochaine pandémie, la cybersécurité ou le changement climatique.
Quelles sont les répercussions de la guerre en Ukraine sur le travail du PNUD ?
Contrairement aux instances politiques de l’ONU, comme le Conseil de sécurité, nous avons l’avantage d’être accueillis comme des partenaires dans toutes les nations du monde. Il est étonnant de voir avec quelle confiance on nous reçoit dans les pays partenaires, d’autant plus que nous ne sommes pas une organisation d’un jour. Nous accompagnons certains pays depuis des décennies et ces échanges montrent que la coopération internationale ne doit pas nécessairement être politisée, mais qu’elle est une offre visant à encadrer son propre développement. Je le vis actuellement avec le Bangladesh, o#ù nous avons collaboré pendant des années avec différents gouvernements. Même dans la situation de crise actuelle avec le gouvernement de transition de Muhammad Yunus, la coopération avec le PNUD n’a pas été remise en question. La promesse de l’ONU selon laquelle les pays peuvent compter sur le PNUD pour mettre en œuvre l’idée de coopération internationale de manière très concrète reste un élément positif.
Kurz und kräftig. Die wöchentliche Dosis Aussenpolitik von foraus, der SGA und Caritas. Heute steht Aserbaidschans Beziehung zu Russland im Fokus. Einst postsowjetische Verbündete, distanziert sich Aserbaidschan seit 2020 zunehmend vom Einfluss des Kremls. Nr. 483 | 12.08.2025
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Zu den BeiträgenDas Schweizer Mandat im UNO-Sicherheitsrat (2023 und 2024) fiel in turbulente Zeiten, der Rat hatte Schwierigkeiten, in den grossen Fragen Entscheide zu fällen. Jeden Samstag haben wir das Ratsgeschehen und die Haltung der Schweiz zusammengefasst.
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