Le traité sur l’Union européenne (TUE), ou traité de Maastricht, est entré en vigueur le 1er novembre 1993. Il crée notamment la politique étrangère et de sécurité commune (PESC). Le poste de haut représentant pour la PESC, visant à incarner cette politique, a été créé en 1999 avec le traité d’Amsterdam. Des comités ont aussi été mis en place avant le traité de Lisbonne en vigueur à partir de 2009 : Comité politique et de sécurité (COPS), Comité militaire de l’Union européenne (CMUE). Le poste dorénavant intitulé haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité a été profondément remodelé par le traité de Lisbonne. Le haut représentant exerce dorénavant la présidence du Conseil des affaires étrangères (rassemblant les ministres des États membres), il est l’un des vice-présidents de la Commission européenne (ce faisant, l’ancien poste de haut représentant a été fusionné avec celui de commissaire aux relations extérieures) et il dirige le nouveau Service européen pour l’action extérieure (SEAE), c’est-à-dire le service diplomatique de l’Union établi en 2011.
L’objectif de la présente contribution est de s’intéresser aux grands principes politiques de l’Union européenne (UE) en matière de sécurité et de défense en adoptant un point de vue historique. Nous allons comparer les traités européens successifs que sont le traité de Maastricht, le traité d’Amsterdam (entré en vigueur en 1999), le traité de Nice (entré en vigueur en 2003) et enfin le traité de Lisbonne. À relever que les grands principes politiques concernant la sécurité et la défense qui se trouvaient dans le projet de traité constitutionnel, signé en 2004 mais jamais ratifié, se sont retrouvés intégralement dans le traité de Lisbonne. Passons en revue successivement ces dix grands principes :
La coopération entre États membres de l’UE en matière de politique étrangère, de sécurité et de défense est de type intergouvernemental, c’est-à-dire que les décisions se prennent par consensus entre les États. Autrement dit, il existe un droit de veto national sur les décisions communes à prendre.
Le traité de Maastricht mentionne « la définition à terme d’une politique de défense commune ». Le traité d’Amsterdam renforce le propos en évoquant « la définition progressive d’une politique de défense commune », phrase reprise par le traité de Nice et celui de Lisbonne. Cette politique n’est toutefois pas explicitement définie.
Le traité de Maastricht indique que la politique de défense commune « pourrait conduire, le moment venu, à une défense commune ». Le traité d’Amsterdam adapte la phrase : la politique de défense commune « pourrait conduire à une défense commune, si le Conseil européen en décide ainsi. Il recommande, dans ce cas, aux États membres d’adopter une décision dans ce sens conformément à leurs exigences constitutionnelles respectives. » Le traité de Nice ne change pas cet intitulé. Le traité de Lisbonne fait preuve de volontarisme apparent en ôtant la conditionnalité, mais sans rien changer sur le fond : la politique de défense commune « conduira à une défense commune, dès lors que le Conseil européen, statuant à l’unanimité, en aura décidé ainsi. Il recommande, dans ce cas, aux États membres d’adopter une décision dans ce sens conformément à leurs règles constitutionnelles respectives. »
Il n’a jamais été prévu que la PESC conduise à la création d’une armée européenne. La chose a été écrite noir sur blanc par le Conseil européen en date du 19 juin 2009 dans le cadre de garanties données à l’Irlande après un premier référendum négatif sur la ratification du traité de Lisbonne, en vue d’un second référendum qui sera lui positif : « Le traité de Lisbonne ne prévoit pas la création d’une armée européenne ni de conscription pour une quelconque formation militaire. »
Le traité de Maastricht indique que l’UEO, organisation de coopération militaire remontant aux années 1950 que l’on a pu qualifier de « belle au bois dormant » de la défense européenne, sera l’enceinte utilisée par l’UE pour ses actions touchant le domaine de la défense. Le traité d’Amsterdam va dans le même sens mais évoque « l’intégration éventuelle de l’UEO dans l’Union ». Actant la naissance de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) à la suite d’une initiative franco-britannique entérinée lors du sommet de Saint-Malo en 1998, le traité de Nice ne mentionne plus l’UEO. Le traité de Lisbonne renomme la PESD en politique de sécurité et de défense commune (PSDC) et l’UEO est formellement dissoute en 2011.
Le traité de Maastricht indique que « la politique de l’Union au sens du présent article n’affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres ». Cette clause est maintenue depuis lors dans les traités successifs. Elle signifie que le statut de neutralité ou de non-alignement de certains États membres de l’Union n’est pas remis en question. Quatre pays sont concernés actuellement : Autriche, Chypre, Irlande et Malte.
Le traité de Maastricht est très clair sur la primauté de l’OTAN par rapport à l’UE en matière de sécurité et de défense. La formulation est même renforcée avec le traité d’Amsterdam et maintenue avec ceux de Nice et Lisbonne, ce qui donne : « [la politique de l’Union] respecte les obligations découlant du traité de l’Atlantique Nord pour certains États membres qui considèrent que leur défense commune est réalisée dans le cadre de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et elle est compatible avec la politique commune de sécurité et de défense arrêtée dans ce cadre. » Aujourd’hui, 23 des 27 États membres de l’UE appartiennent à l’OTAN. Parmi les 32 pays membres de l’OTAN, 9 ne font pas partie de l’UE.
La possibilité d’une coopération en matière d’armements est introduite par le traité d’Amsterdam et aboutit à la création de l’Agence européenne de défense en 2004, qui aide les États à améliorer leurs capacités militaires grâce à la coopération entre eux.
Le traité de Lisbonne introduit la possibilité d’établir une coopération structurée permanente en matière de sécurité et de défense (CSP) afin d’aller plus loin en matière de coopération interétatique. Ce nouvel instrument a été activé en 2017 par une décision du Conseil. À l’exception de Malte, tous les États membres de l’Union appartiennent à la CSP.
Une clause d’assistance mutuelle entre les États membres de l’Union a été introduite par le traité de Lisbonne. Elle se lit ainsi : « Au cas où un État membre serait l’objet d’une agression armée sur son territoire, les autres États membres lui doivent aide et assistance par tous les moyens en leur pouvoir, conformément à l’article 51 de la charte des Nations unies. Cela n’affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres. Les engagements et la coopération dans ce domaine demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord, qui reste, pour les États qui en sont membres, le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en œuvre. » La décision précitée du Conseil européen du 19 juin 2009 relative aux préoccupations du peuple irlandais concernant le traité de Lisbonne énonce ce qui suit : « Il appartiendra aux États membres – y compris l’Irlande, agissant dans un esprit de solidarité et sans préjudice de sa politique traditionnelle de neutralité militaire – de déterminer la nature de l’aide ou de l’assistance à fournir à un État membre qui est l’objet d’une attaque terroriste ou est l’objet d’une agression armée sur son territoire. »
Sur le papier, cette clause peut être rapprochée du fameux article 5 du traité de Washington à la base de l’OTAN. La garantie de sécurité américaine, l’existence d’une organisation militaire intégrée incluant une dimension nucléaire et la primauté juridique donnée à la défense transatlantique ont toutefois empêché jusqu’à maintenant l’OTAN d’être concurrencée par l’UE, sauf en matière de missions externes de faible intensité concernant le maintien de la paix, la prévention des conflits et le renforcement de la sécurité internationale.
Gilles Grin, docteur en relations internationales, est le directeur de la Fondation Jean Monnet pour l’Europe à Lausanne. Il est par ailleurs chargé de cours à l’Université de Lausanne, académicien correspondant pour la Suisse de l’Académie royale des sciences économiques et financières d’Espagne et membre du Comité de la SGA-ASPE.
Références juridiques: Voir les liens ci-dessous.
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